L'église Notre Dame était comble pour ce dernier adieu à Bernard Lefèvre. Une belle vidéo de José Alcala en restitue l'émotion, la ferveur.
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Bernard nous manque. Et déjà nous savons que nous ne pourrons plus penser à lui sans ressentir ce manque, ce vide irrémédiable. Que peuvent les mots ? Que peuvent quelques mots de plus contre la peine, la tristesse qui nous étreint maintenant ?
Devant l’immense douleur de Denise, des enfants de Bernard, de toute sa famille, le silence ne serait-il pas bienvenu ?
Sa vie est close. Bernard ne vivra plus que dans le souvenir qu’il laisse à chacun. Et bien que sa vie soit unique nous portons chacun en nous des souvenirs différents du même homme. Sa vie est désormais dispersée en mille facettes, mille éclats de mémoire, autant de souvenirs qu’il comptait d’amitiés. Et peut-être ne suis je pas le mieux placé pour parler de ce qui fait l’unité d’un homme.
Car, à la différence de beaucoup d’entre vous, que je remercie du fond du cœur d’être venus si nombreux, je n’ai connu Bernard qu’au soir de sa vie, lorsqu’il a rejoint notre équipe en 1994. La différence de génération et une carrière professionnelle qui l’a emmenée dans différents collèges du département font que je n’avais jamais rencontré ce Lovérien, pourtant connu et aimé de tous. Qu’il soit populaire à Louviers, je le savais par cette remarque d’un adversaire politique : « Avec Bernard Lefebvre sur ta liste, tu ne peux que gagner ! » Ce qui a été démontré, à trois reprises.
C’est ce compagnonnage politique qui m’a fait découvrir Bernard Lefebvre, l’homme qu’il était et aussi le sportif et l’éducateur.
Commandeur des Palmes académiques Bernard Lefèvre était titulaire de la plus haute distinction dont puisse rêver un professeur. Il a illustré par sa carrière, la mission confiée par la République au corps enseignant. Non seulement transmettre le savoir, mais de donner à chacun la chance de s’épanouir en développant le potentiel qu’il porte en lui, d’acquérir l’autonomie de jugement qui fait le citoyen, d’affirmer qu’il n’est pas de citoyenneté sans responsabilité et sans solidarité. Pour d’innombrables enfants, Bernard Lefèvre a été un éveilleur de conscience, un soutien moral, un pédagogue hors pair. Et les qualités de l’homme, son dynamisme, sa droiture, son sens des responsabilités lui ont valu le respect de tous ses collègues.
Son départ en retraite a été l’occasion d’une exceptionnelle manifestation d’hommage à sa carrière, 2 heures et demie de réjouissances et de spectacle bien peu académique devant des centaines de collègues et d’amis.
Bernard Lefevre était un homme de culture, et sa profonde connaissance de l’histoire motivait son engagement politique. Ambassadeur de la Ville de Louviers auprès des associations patriotiques, du monde combattant, que je remercie de leur présence, il portait la plus grande attention au devoir de mémoire.
Que Bernard ait été un sportif dans l’âme, c’est peu de le dire Mais sa vision du sport, outre les joies qu’il a connue comme joueur de football et dirigeant de l’USL, reste celle d’un éducateur. Sa grande fierté était d’avoir fondé l’Ecole de foot de l’£USL
Dans le monde sportif, Bernard était comme un poisson dans l’eau. Connu, reconnu par tous, il ne manquait pas une assemblée générale, une remise de médailles, une compétition importante.
Gràce à lui, Louviers s’est dotée d’équipements sportifs importants. Je me souviendrai de son bonheur lors de l’inauguration du gymnase Colette Besson, de l’ouverture du complexe de tennis qui, peut-être, portera son nom. Le tennis, il l’a pratiqué comme délassement, avant que, la maladie lui interdisant tout effort, il se tourne vers le plus calme des sports. Combien de fois, allant courir dans les brumes du petit matin autour de l’étang d’Acquigny, n’ai je pas rencontré Bernard, levé à l’aube pour taquiner la truite sur les berges de l’ITON.
Bernard Lefèvre a démontré que le sport était l’école de sa vie. Il avait fait sienne la phrase célèbre d’Albert Camus, devenue sa profession de foi : ce que je sais de la morale des hommes, c’est au football que je le dois.
Et comment ne pas le croire lorsqu’on voyait à quel point il savait être combattif sans être agressif, déterminé à vaincre, mais en respectant l’adversaire et les règles du jeu.
A la mairie, Bernard était célèbre pour ses bon mots, son humour, mais aussi ses coups de gueules, pour ce geste qu’il avait de jeter ses lunettes sur la table des négociations, pour ponctuer une colère souvent feinte. Car les colères de Bernard, motivées par la défense de bonnes causes, ne blessaient personne. Pas une trace de bassesse, de jalousie, de mesquinerie dans ce tempérament généreux.Bernard était fair play, honnête et de bonne foi qualités, si rares, si précieuses, mais que le sport enseigne si bien. Il savait aussi réconforter encourager, inciter à rebondir. Plus d’une fois, passant son bras autour de mon cou, dans un geste d’entraineur, il a eu des mots de sportif : « L’important c’est de participer, d’avoir donné le meilleur de soi même. Tu feras mieux demain. »
Au fond, ce qui faisait l’unité de cet homme, c’est l’amour de la vie. La vie qui est action et engagement. La joie de l’âme n’est-elle pas dans l’action ? La vie qui n’est pas pleine si elle n’est pas rencontre, découverte, main tendue vers les autres. La vie qui est cette bonté, cette générosité, cette capacité à donner seule capable de briser les murs de la solitude réchauffer les échanges entre les hommes.
En Bernard, la vie débordait… et la bonté, la générosité aussi
Qu’est-ce qu’une vie réussie ? Question que posent toutes les philosophies. Une vie réussie, une vie où l’on a été utile, où l’on a aidé à l’épanouissement des autres, servi son prochain comme son idéal. Une vie où l’on apporté beaucoup de chaleur, un peu de joie dans un monde froid, glacé par la cupidité et la violence des hommes.
A ce titre, oui, Bernard a réussi sa vie. Que son exemple nous aide à réussir la nôtre.
Alors les mots, oui, ne sont que des mots, qui semblent disparaître aussitôt que prononcés. Mais ce sont les mots qui construisent la mémoire commune, qui rassemblent tous ces morceaux, ces éclats de vie que Bernard nous a donnés pour en faire un instant collectif, de communion et d’hommage partagés. Au nom de l’équipe municipale, au nom de Louviers, merci, Bernard de nous avoir tant donné.