Un fou tue un passant à Grenoble ? On va juger le fou ! Ce n'est pas une exception, hélas...
C'est notre
société, affolée par sa faiblesse morale, qui devient folle ! Une
faiblesse morale dont Rachida Dati et le sarkozysme donnent des
illustrations quotidiennes. Quand la Justice vacille, c'est un pilier de la République qui menace de s'effondrer.
Déjà, la Justice a subi des coups navrants, des coups quasi-mortels avec l'instauration des peines-planchers et de la rétention de sûreté. Il faut le dire, il faut le hurler : en France, depuis Dati, dans de nombreux cas, le juge ne juge plus...
Désormais, la durée de la peine infligée par le tribunal peut être prolongée indéfiniment par une "rétention administrative". Comment appeler justice un système administratif où le tribunal condamne un homme à quinze ans de prison, alors que, sans le savoir, il peut être privé de liberté à jamais par une commission irresponsable et toute puissante ?
Tous les jours les tribunaux, transformés en distributeurs de vengeance d'Etat, prononcent des peines-planchers, automatiques en cas de récidives. A quoi bon tenir audience ? Un distributeur automatique suffit.
En France, on commence à juger les fous. Irresponsables, mais coupables ! Va-t-on bientôt y juger les animaux, comme au Moyen-Age ? La France, mère de l'esprit des Lumières, va-t-elle retourner à la barbarie, sous la forme moderne du dévoiement de la justice vers la thérapeutique des victimes ?
Sous la poussée de l'exigence sécuritaire, une justice dévoyée se met peu à peu en place, donnant la priorité à la "parole des victimes", à la "nécessité de faire de l'audience pénale le lieu du deuil des victimes". Considération thérapeutique noble, mais qui n'a rien à voir avec la justice.
Qu'on me permette d'y voir le masque moderne du besoin individuel de vengeance. Besoin individuel de vengeance qui est précisément ce contre quoi la Justice s'est construite au fil des siècles et du progrès de la civilisation. Ce souci apparent pour les victimes, légitime mais dévoyé, est aussi le masque d'une démagogie électoralement payante qui n'ose pas dire que la vengeance ne soulage pas le malheur, mais l'aggrave. Qui n'ose pas affirmer la nécessité d'une construction morale de l'individu en citoyen.
La société d'aujourd'hui est inapte à produire des citoyens autonomes, capables d'affronter la réalité d'un monde où le malheur existe sans être nécessairement le fait du Diable, capables de trouver en soi, dans sa force morale, la capacité à assumer la part de malheur irréductible que comporte la condition humaine, à commencer par la maladie et la mort. A tout malheur, il faut un bouc émissaire ! Une régression de l'âge adulte vers une logique d'enfants. Mais le sarkozysme, c'est aussi cela : nous réduire à l'état d'enfants qui ont besoin d'un père hyper-protecteur...
Alors on ne cherche plus à s'attaquer aux carences des systèmes collectifs censés nous protéger contre le malheur, on porte plainte contre les agents individuels de ce système !
Des suicides dans les prisons ? Le ministre de la Justice ne s'attaque pas au système carcéral alimenté par ses propres directives, elle s'attaque au directeur de la prison.
Un suicide de mineur en prison ? Elle s'attaque au procureur qui n'a fait que suivre les instructions du ministre !
La faiblesse morale de la société française exige la vengeance pour tout malheur individuel, exige le châtiment d'un responsable pour chaque malheur, exige des coupables pour tout. Pour ceux qui flattent les hommes dans le sens des instincts et non de la raison, c'est politiquement payant !
La liberté des juges, la défense du principe intangible de l'individualisation des peines en fonction du contexte, de la personnalité, de l'histoire du coupable vaut bien une levée en masse de la République et des républicains. C'est un combat autrement grave que les misérables querelles politiciennes d'aujourd'hui.
Le PRG exige l'abrogation des peines-planchers et de la rétention administrative. Le PRG exige l'abrogaton de la détention préventive en matière correctionnelle. Nous sommes le grand parti... des libertés.